Peintures éthiopiennes
Peintres français et éthiopiens à Gondar (1932)
Lors de la mission Dakar-Djibouti, Marcel Griaule entend tout à la fois poursuivre les enquêtes commencées lors de son premier voyage et donner une nouvelle dimension à son action. À cette fin, il propose au peintre Gaston-Louis Roux de rejoindre la mission en Éthiopie pour participer au travail de recherche mais aussi pour enseigner aux peintres éthiopiens la méthode de la peinture à l’huile, de façon « à assurer une existence moins précaires »[4] aux œuvres. Cette partie du programme reste lettre morte mais Roux est fort occupé à copier des peintures pour les échanger contre des œuvres originales, en particulier celles des églises Abba Antonios et de Qaha Iyasous. Il s’agit dans les deux cas de peintures murales sur toile que la mission a démarouflées et découpées en morceaux pour les transporter.
Roux participe en outre aux enquêtes : avec le peintre éthiopien Kassa rencontré par la mission sur la route entre le Soudan et Gondar, il met au point une fiche « peinture » rédigée en amharique et traduite sommairement en français[5]. Dans un manuscrit autobiographique, Kassa relate également à grands traits sa formation et son activité[6]. À l’instigation de Griaule, il dessine enfin des « maquettes », c’est-à-dire un schéma type de l’emplacement présumé de chaque sujet dans les ensembles de peintures murales. Un autre peintre, le prêtre Mehratou, produit un travail similaire. Sans doute pour étude et documentation, Kassa réalise par ailleurs une « maquette » de ce que Griaule avait appelé des silhouettes. Ces œuvres sont alors le plus souvent des hybrides : si Griaule leur demande de donner une image d’un sujet ou du programme iconographique d’un mur d’église, les peintres – tout en répondant à sa demande – rassemblent différents éléments pour créer une image qui semble devenir archétypique pour leurs commanditaires.
À Gondar, les membres de la mission se créent par ailleurs un réseau d’informateurs parmi les prêtres qui leur vendent des peintures – principalement des icônes des XVIIe-XXe siècles –mais parfois qui les peignent eux-mêmes, à l’instar de Kassa, de Mehratou ou de Nagga. Responsable de la paroisse d’Abba Antonios et l’un des principaux peintres de Gondar à cette époque, Nagga réalise pour la mission une bannière de procession[7], une petite icône portative[8] et l’illustration d’une Clé des songes[9].