Les collectes d’objets ethnographiques
Dessins explicatifs
Les rédacteurs des Instructions sommaires pour les collecteurs d’objets ethnographiques soulignent à plusieurs reprises l’importance du dessin pour documenter un objet, notamment pour montrer la façon de s’en servir [120]. Ils s’inspirent là encore des cours de Marcel Mauss [121], mais ne donnent aucune précision sur la méthode à employer. Sur le terrain, ce sont les dessins de Marcel Griaule qui semblent servir de modèle aux autres ethnographes de son équipe, lors des missions des années 1930.
La plupart de ces dessins font partie des renseignements écrits portés sur les fiches thématiques manifold. Dans de nombreux cas, les informations graphiques présentes sur chaque fiche se réduisent d’ailleurs à un ou plusieurs croquis annotés montrant : l’objet ainsi que les dimensions et les noms vernaculaires de ses différentes parties [122], l’emboîtement ou les ligatures de ces éléments [123], la façon de tenir cet objet [124], la manière de l’utiliser [125]. Les objets les plus dessinés sont justement ceux qui exigent une technique ou un maniement spécifique: les pièges, les armes, les instruments de musique, le matériel de pêche, les outils agricoles... Parce qu’ils sont au centre des travaux de Griaule, jouets et masques suscitent également de nombreux croquis, contrairement aux bijoux, aux vêtements et aux autres objets rituels. Les dessins de jouets d’enfant sont d’ailleurs précieux d’un point de vue muséographique : ils permettraient de reconstituer des avions, fusils ou automobiles en tiges de mil à partir des objets en pièces détachées conservés aujourd’hui au musée du quai Branly.
Très précis, ces dessins explicatifs sont souvent de grande qualité, en particulier lorsqu’ils sont l’oeuvre de Marcel Griaule ou de Jean-Paul Lebeuf. Les croquis de Jean Mouchet et d’Éric Lutten sont généralement plus schématiques tout en étant construits de manière similaire, avec un ou plusieurs dessins au centre et des annotations plus ou moins succinctes autour. Certaines fiches inversent néanmoins le rapport entre écrit et dessin, avec un croquis sommaire d’illustration placé en marge ou à la fin d’un long texte explicatif. Plus rarement encore, la fiche est divisée en deux, avec un dessin annoté de l’objet à gauche et des informations plus générales à droite. Enfin, quelques fiches muséographiques comportent au recto ou au verso un ou plusieurs dessins commentés [126], ajoutés parfois dans un second temps.