Enquête linguistique
Des mots aux textes
La collecte linguistique vient également en appui aux études ethnographiques : sur le terrain, les chercheurs recueillent différents lexiques associés à leurs thèmes de recherche afin d’incorporer à leurs descriptions des termes vernaculaires transcrits selon les normes enseignées à l’Institut d’ethnologie. Par ailleurs, un certain nombre de devinettes, chants, contes et prières sont recueillis dans leur langue d’origine puis traduits mot à mot de façon juxtalinéaire, en permettant ainsi un accès réduit et non explicité à la logique syntagmatique de cette langue. Issus d’enquêtes thématiques portant par exemple sur la circoncision, les jeux, les funérailles ou les fêtes de semailles, ces textes sont ensuite associés à des informations plus descriptives pour produire de petites monographies sur tel ou tel sujet[9].
Dans le cas de recherches centrées sur la littérature orale, la collecte, la transcription, la traduction et l’analyse de chants, prières ou récits locaux deviennent même l’objectif principal des enquêtes de terrain, à l’instar du travail effectué en pays dogon par Michel Leiris puis par Deborah Lifchitz lors des missions Dakar-Djibouti (1931-1933) et Paulme-Lifchitz (1935)[10]. Les textes recueillis sont alors étudiés pour eux-mêmes, et non pour documenter une pratique ou un rituel. En outre, leur contexte d’énonciation et les performances orales de leurs narrateurs sont pris en compte. Une étape est donc franchie : de la liste de mots décontextualisée, donnant de la langue une vue atomisée, vers la saisie du discours en action, pris dans des pratiques précises et bien documentées.